
Amboseli : un modèle pour la conservation des éléphants d’Afrique

Il est situé à l’ouest du continent africain, plus précisément au sud du Kenya. De par sa taille, sa localisation et la population locale, le parc national d’Amboseli représente l’endroit le plus sécurisé pour les éléphants d’Afrique. Pourchassée pour son ivoire, l’espèce pourrait avoir disparu d’ici à vingt ans.
La réserve kényane d’Amboseli s’étend sur 390 km² et abrite les espèces qui font la renommée de la grande savane africaine. Lions, guépards, girafes, zèbres… Elle est une destination idéale pour les touristes rêvant de safaris, ses occupants phares étant incontestablement les éléphants. Environ 1200 individus parcourent les plaines d’Amboseli librement, et surtout, à l’abri des braconniers… ou presque. Le taux de braconnage y est largement plus faible que dans le reste du continent. Plusieurs facteurs sont à l’origine de ce fait, à commencer par l’Amboseli Trust for Elephants (ATE). Fondée en 1972 par les chercheurs Cynthia Moss et Harvey Croze, en collaboration avec Kenya Wildlife Service, cette organisation avait initialement pour but d’étudier les pachydermes du parc. Elle représente la recherche la plus conséquente effectuée sur les éléphants d’Afrique. En analysant près de 1700 individus au cours des années, l’ATE a permis des découvertes fascinantes sur leur comportement. Communication, mémoire, reproduction, intelligence, les scientifiques peuvent travailler à la conservation de l’espèce grâce à leurs recherches.
L’implication de la population est essentielle
Ce qui néanmoins fait la force d’Amboseli, c’est l’implication essentielle des populations locales dans la protection des espèces. La réserve se trouve en terre Masai, 300 d’entre eux y sont employés pour surveiller les éléphants. Leur présence constante à Amboseli, ainsi que celle des scientifiques, repousse les braconniers. Il arrive toutefois que la cohabitation entre humains et éléphants se complique, notamment lorsque ces derniers empiètent sur les terres des paysans. Avec le « consolation scheme » mis en place en 1997, l’ATE offre une aide financière aux éleveurs qui perdent du bétail à cause des éléphants, évitant des exécutions sommaires. Pour chaque vache, chèvre ou mouton tué par ces derniers, la coutume Masai exigeait la mort d’un spécimen. L’ATE mise également sur l’éducation de la communauté pour mettre en avant les bienfaits autant économiques qu’environnementaux de la présence de ces animaux. Il valorise son programme auprès des plus jeunes en offrant l’accès à l’école aux filles, un droit qui leur est souvent refusé. Des bourses d’études sont, en outre, distribuées aux jeunes Masai les plus prometteurs. Grâce à ces connaissances, la population prend à coeur la préservation de l’espèce. L’éducation s’étend même à l’échelle internationale. De nombreux livres sur la vie des pachydermes d’Amboseli ont été publiés, notamment La Longue Marche des Eléphants de Cynthia Moss, paru en 1989. Les efforts de l’ATE et de la communauté Masai ont un réel impact sur le bien-être des éléphants dans le parc national. Il est le seul endroit en Afrique où leur âge moyen n’a pas baissé au cours des dernières années.

Des carcasses d’éléphants victimes du braconnage – © FlickR / U.S. Fish and Wildlife Service Headquarters
Recrudescence du braconnage
Amboseli n’est pas aussi vaste que les autres grandes réserves naturelles africaines. C’est pourquoi le travail des Masai est une véritable réussite, a affirmé l’un d’entre eux au Guardian. Bien que le braconnage y soit présent, il est minime par rapport au reste du continent. Les chiffres sont accablants : entre 20.000 et 35.000 éléphants sont abattus chaque année. Leur population était de 550.000 en 2006 contre 470.000 en 2013. Si rien n’est fait, l’éléphant d’Afrique pourrait disparaître dans vingt ans. Pourtant, le commerce d’ivoire est devenu illégal au niveau international en 1989. Il a été légalisé partiellement en Afrique Australe en 1997 puis en Afrique du Sud en 2000, favorisant le commerce illégal. La recrudescence du braconnage correspond au prix de l’ivoire sur le marché chinois. Principal client du trafic, il a triplé entre 2010 et 2014. Face à l’impuissance générale, une conférence s’est tenue à Kasane au Botswana. Plusieurs mesures y ont été discutées, notamment la traque toujours plus active des braconniers. « Dans les endroits où l’on observe les taux les plus élevés de mortalité infantile humaine, nous avons aussi observé les niveaux les plus élevés de braconnage des éléphants », expliquait une étude soumise à la conférence par un délégué de la Convention internationale sur le trafic des espèces en danger (Cites), citée par Libération. Cela démontre l’importance de la prise en compte des locaux dans la lutte contre le braconnage. A l’image d’Amboseli, l’éducation et l’implication de la population dans la conservation des espèces semblent capitales et inévitables.