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Austérité : la réponse de l’Equateur

Austérité : la réponse de l’Equateur

L’Equateur est un petit pays qui ne suscite pas vraiment l’attention. Le peu d’enjeux stratégiques n’amène pas les nations occidentales à s’y intéresser. Pourtant, à une heure d’austérité quasiment généralisée en Europe, la manière qu’a eue l’Equateur de répondre aux difficultés économiques pose de nouvelles questions au sein des grilles de lecture en vogue.

Une dette publique équivalente à un petit cinquième du budget de l’Etat, un taux de chômage inférieur à 5 % en six ans, une diminution par deux de la pauvreté et en toile de fond de ces performances, un taux de croissance de 4 %. 4 %, ce n’est pas la croissance à deux chiffres visée par les fonds de pension. En France, toutefois, il serait bien mal avisé d’être dédaigneux, quand une variation à la hausse de 0,3 point suffit à déclencher un enthousiasme médiatique presque national.

La quête de souveraineté

Rafael Correa, actuellement à la tête de cet Equateur stable, s’attache fortement à la question de la souveraineté de l’Etat. Ce concept impose de prendre ses distances avec des influences régulièrement présentes en Amérique latine, à savoir les Etats-Unis et des institutions affiliées aux logiques économistes atlantistes, FMI en tête. En 2008, peu après son arrivée, la première décision d’importance de Rafael Correa a donc été de remettre en cause la dette que l’Equateur avait envers le Fond Monétaire International.

© Tren Ecuador - Flickr

© Tren Ecuador – Flickr

L’Amérique Latine, de manière générale, garde en mémoire l’intervention de ce même FMI en Argentine dans les années 1990. La croissance tant recherchée y cohabitait allègrement avec un taux de chômage de 20%, leçon pouvant expliquer la circonspection de certaines élites sud-américaines à l’encontre de l’institution.

Et tout comme en Argentine au début de la décennie 2000, ce refus de l’Equateur met de nouveau en lumière une théorie de la dette, assez méconnue et qui conteste sa légitimité même. Rafael Correa parle de dette illégitime, chose difficilement concevable pour beaucoup de commentateurs économiques considérant que le contrat établi la justifie. Les travaux de F.-X. Verschave sur la Françafrique montraient déjà, voilà une quinzaine d’années, toute l’imposture d’accords se parant du terme de « dette ». Cette décision de Correa n’a d’ailleurs aucunement entaché la solvabilité de l’Equateur.

Une croissance d’utilité publique

Suivant une logique keynesienne, l’Etat équatorien a voulu lancer des projets pour lesquels il n’a pas hésité à recourir à l’emprunt. Simplement, le pays a juste trouvé d’autres interlocuteurs financiers, Venezuela et Chine en tête, à hauteur de plusieurs milliards de dollars chacun. Des partenaires qui n’ont pas imposé une grille de lecture à l’administration du pays, ni exigé de garanties d’orientation de la politique nationale. D’où la sauvegarde de la souveraineté.

© Denis Bocquet - Flickr

© Denis Bocquet – Flickr

Ces prêts ont participé aux résultats économiques et sociaux encourageants en Equateur, sous les mandats de Correa. A titre d’exemple, le budget consacré à l’Education a quasiment été multiplié par dix. D’autres structures telles que la sécurité sociale, les infrastructures de transport, de soins médicaux se sont également développées.

Cela a même ouvert des perspectives sensibles sur le plan énergétique. L’investissement de la Chine en Equateur porte effectivement et en partie sur une structure de raffinage du pétrole. A l’instar de l’Equateur, bien d’autres pays sont riches en ressources naturelles mais ne disposent pas des structures adéquates pour les traiter. Par exemple, dans la Côte d’Ivoire d’Houphouët-Boigny,  premier producteur de cacao au monde, il était impossible de trouver du chocolat local au goût ne serait-ce qu’acceptable.

Aujourd’hui, l’Equateur a l’ambition d’atteindre une forme d’autonomie, puisque même cette exploitation du pétrole se conçoit en vue d’investir dans d’autres sources d’énergie lorsque les réserves viendront à faiblir.

A la lumière du cas équatorien, il apparaît possible de réussir en dehors des cadres de réflexion favorisés par les instances occidentales. S’il n’était ce carcan aux allures plus idéologiques que pratiques, l’Europe en crise pourrait y puiser quelques inspirations de nature à rafraîchir un système aux soubresauts systémiques.

A propos de l'auteur

Benjamin Le Roux

Simple rédacteur web indépendant, s'intéresse à peu près à tout, du moment qu'on peut écrire dessus.

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