
La Slovaquie démocratise le train gratuit

Depuis quelques semaines, la Slovaquie applique une mesure novatrice qui pourrait bien inspirer prochainement d’autres gouvernements. La Compagnie Ferroviaire Nationale Slovaque (ZSSK), sur toutes ses lignes desservies, ainsi que la compagnie privée RegioJet, sur son axe Bratislava – Komarno (ville-frontière avec la Hongrie), offrent depuis la mi-novembre la possibilité de voyager gratuitement en seconde classe à des catégories de passagers donnés.
Les conditions du transport gratuit
Les transports gratuits sont ainsi réservés, et ce peu importe leur nationalité, aux enfants âgés de moins de 15 ans ainsi qu’aux personnes âgées de plus de 62 ans.
Mais ce ne sont pas les seuls gagnants de cette décision. Les lycéens et étudiants de moins de 26 ans suivant un cursus en Slovaquie, ainsi que les Slovaques étudiant à l’étranger, profitent ainsi de cette avancée, au même titre que – sans distinction d’âge – toutes les personnes souscrivant au système national d’assurance retraite, mais aussi les titulaires de rentes mensuelles réservées aux orphelins, veufs et invalides, ainsi qu’à ceux bénéficiant de l’aide sociale.
Sans distinction de nationalité, les enfants, vieillards et personnes de moins de 26 ans inscrites dans des établissements slovaques peuvent aujourd’hui profiter d’un transport ferroviaire gratuit.
Des lourdeurs administratives héritées de l’ancien régime communiste ont aussi fait leur apparition en parallèle de ces changements. A l’exception des enfants de moins de 6 ans, toutes les autres personnes éligibles à ce programme doivent posséder un document édité par la ZSSK prouvant leur droit à profiter de cette mesure. Dans le cas des élèves et étudiants un simple certificat de scolarité de l’établissement suffit pour son obtention. Ce papier est à récupérer dans des dizaines de gares à travers le pays. Enfin, autre inconfort en lien avec cette initiative, les passagers doivent avant chaque trajet demander un nouveau billet gratuit au guichet.
Néanmoins, jusqu’au mois de mars, et en prévision d’une arrivée massive de voyageurs concernés, ces précieux tickets sont dispensés aux personnes n’ayant pas encore eu le temps de se faire éditer ce précieux pass.
Le ministre des transports Jan Pociatek a ainsi affirmé que le premier jour de l’opération, à la date du 17 novembre 2014, les transports publics slovaques ont ainsi édité plus de 20 000 tickets gratuits. Cette mesure s’accompagne d’une augmentation de la capacité des trains, plus de 12 000 places en plus ayant été aménagées. Le nombre de salariés en gare au service des passagers a lui aussi été revu à la hausse.

Robert Fico © Flickr
Des lignes restent payantes
Toutes les liaisons ferroviaires ne sont pas gratuites.
Les lignes privées InterCity et EuroCity, mais aussi toutes les autres ne bénéficiant pas d’aides financières de l’Etat, n’appliquent pas ce programme.
Dans un système d’exploitation en pleine mutation, d’autres anomalies devront encore être corrigées. En effet, dans le cas de voyage à l’étranger, un passager doit payer un supplément en gare de la dernière ville slovaque avant la frontière, simplement pour avoir le droit de rejoindre cette dernière.
Les voix discordantes
Saluée par la majorité de la population locale, cette mesure a aussi des détracteurs.
Tomas Smutny, responsable de l’Association Génération Nouvelle, considère cette décision du pouvoir comme un acte « de populisme irresponsable ». Selon lui, le gouvernement aiderait bien plus les jeunes en abolissant l’impôt sur le revenu chez les jeunes ou les personnes âgées, ces dernières cherchant souvent à compléter leur maigre retraite avec une activité complémentaire.
Les salariés des compagnies ferroviaires concernées dénoncent un autre dommage collatéral de cette décision. Le cheminot Roman Chudy affirme ainsi sans détour :
Avec l’hiver , beaucoup de sans abris préféreront voyager gratuitement dans un train chauffé à travers la Slovaquie, plutôt que de rester dans un hall de gare où le froid est omniprésent.
Une volonté gouvernementale
Le 1er Ministre, Robert Fico, explique cette décision en mettant en avant la volonté d’aider les groupes sociaux les plus démunis:
Nous en sommes arrivés à la conclusion que cette solution est la plus rationnelle et la plus sensée.
Cette mesure était par ailleurs 1 des 15 points du programme gouvernemental visant à améliorer les conditions matérielles des Slovaques.
Pour le pouvoir, il ne s’agit pas seulement de soutenir les classes sociales les plus faibles, mais aussi d’encourager le transport ferroviaire et limiter la circulation des voitures et autobus en Slovaquie.
Alors qu’auparavant seules 900 000 personnes étaient concernées par les transports ferroviaires gratuits, c’est à dire les enfants de moins de 6 ans et les personnes âgées de plus de 70 ans, il est estimé que près de la moitié des 5.5 millions d’habitants de la Slovaquie pourra dorénavant en bénéficier.